jeudi 11 décembre 2008

La maison dans les blés, Jean-Christophe POL

Un homme est si seul au beau milieu de son quotidien.

Un artiste peintre quitte sa famille, quitte la noria des expositions et la solitude de son atelier pour se retrouver dans une maison isolée, achetée sur internet. Dans cette campagne si vivante, il fera connaissance de la troublante Lucie. Elle le ramènera à la source de sa inspiration.

Une BD d'une grande sensualité, une très belle histoire mise en valeur par la narration et le trait noir et blanc de Jean-Christophe POL. Un hymne à la redécouverte de nos désirs et de nos créativités.

mardi 9 décembre 2008

Merci monsieur Laënnec


J'aime écouter la musique des corps. 

Lors de mes premiers contacts avec le vaste monde de la maladie, le contact auditif avec les malades était surtout objet de curiosité, rarement de dégoût (sauf si l'odeur y était associée), et surtout de beaucoup de questionnements sur mes capacités auditives : mais pourquoi donc n'entends-je rien alors que tout le monde autour de ce lit acquiesce gravement quand le professeur dit qu'il y a un magnifique souffle systolique de 3/6, associé à un mémorable frottement péricardique et en plus des crépitants des bases pulmonaires ?

Et puis en plus, j'étais fâché avec mon stéthoscope. Roulé dans la poche de ma blouse, je ne pouvais l'en extraire sans faire tomber tout le contenu de celle-ci. Les embouts dépassant avaient une satanée tendance à s'accrocher à tous les coins de portes, et à s'arracher. Et mettre un stétho dans une oreille sans se rendre compte qu'il n'y a plus l'embout en caoutchouc, ça fait très mal ! Malgré toutes ces misères, je me rendais bien compte qu'il y avait quelque chose d'important dans cet objet. Mon stéthoscope... Le tout premier instrument médical que j'aie acheté. Malgré les prix obtenus par la corpo, il me semblait bien cher pour ma tirelire de jeune P2. Avec ce tuyau au tour du col de ma (toute neuve elle aussi) blouse blanche encore amidonnée, je faisais vraiment docteur maintenant. Ce n'est pas pour rien que les valises de déguisement de docteur en comportent toujours un ! 

Après m'être bien regardé dans le miroir du couloir, en blouse avec mon stétho autour du cou, ou plié dans la poche droite, ou  bien roulé dans la poche gauche... pour choisir la place qu'il garderait durant mes années d'externe, il  bien fallu aller à l'hôpital. Et là... rien. Le grand silence. Première constatation : mettre les embouts à l'endroit (vers l'avant, et non vers l'arrière), c'est mieux... 
Au deuxième essai : une vague de glouglou crrTOUMpshh khkhkhscrat ssshhhhTAglorblglorbl a submergé mes oreilles vierges. Il faut être honnête, malgré les efforts désespérés de l'interne ou du chef de clinique qui nous recevait une ou deux fois par semaine, il a vraiment fallu plusieurs mois pour que je puisse séparer les bruits les uns des autres, leur donner une image mentale, les localiser dans la carcasse plus ou moins résonnante qui leur donnait vie.

Et puis un jour, alors que, comme tout le monde je faisais très sérieusement mmh mmh, l'air inspiré, en passant mon écouteur (après mes dix camarades du jour) sur le même thorax: ...... TOUM...fffffff...TA..... TOUM.....fffff....TA.       

Glps. ça recommence : TOUM...fff...TA...



Hé les copains !

HE, Y'A UN TRUC, là, un bidule... j'ai entendu "fff". C'est un souffle, non ? Et pis le monsieur, il a le cœur qui bat !!!! Trop génial !!! Et pis quand il respire on entend l'air dans ses tuyaux !!! Et même dans son ventre !!!!

Depuis ce jour, j'adore écouter la musique des corps !

PS : anecdote du jour, un p'tit bonhomme de 4 ans me demande "pourquoi t'as 2 testoscopes ?" moi: "ben passeque j'ai 2 oreilles" lui: "t'as raison, comme ça t'entends 2 fois plus mieux".....  

הרב משה בן מיימון (Moshe ben Maïmon, dit Maïmonide)

Homme de foi, théologien, philosophe et médecin, Maïmonide est une des grande figure de la pensée juive. Originaire de Cordoue, dans l'Espagne musulmane du début du XIIème siècle. Sa pensée médicale, incluant l'homme dans la création divine, influence de manière durable les pratiques médicales orientales mais aussi occidentales.

Bien que l'on n'ait pas retrouvé le manuscrit médiéval original, on lui attribue un texte qui est une véritable profession de foi d'un médecin dévoué à l'être humain. Les thèmes développés restent encore bien d'actualité, et il me semble tout à fait complémentaire du serment d'Hippocrate que nous imprimons sur nos thèses.

"Mon Dieu, remplis mon âme d'amour pour l'Art [médical] et pour toutes les créatures. N'admets pas que la soif du gain et la recherche de la gloire m'influencent dans l'exercice de mon Art, car les ennemis de la vérité et de l'amour des hommes pourraient facilement m'abuser et m'éloigner du noble devoir de faire du bien à tes enfants. Soutiens la force de mon cœur pour qu'il soit toujours prêt à servir le pauvre et le riche, l'ami et l'ennemi, le bon et le mauvais.

Fais que je ne voie que l'homme dans celui qui souffre. Fais que mon esprit reste clair auprès du lit du malade et qu'il ne soit distrait par aucune chose étrangère afin qu'il ait présent tout ce que l'expérience et la science lui ont enseigné, car grandes et sublimes sont les recherches scientifiques qui ont pour but de conserver la santé et la vie de toutes les créatures.

Fais que mes malades aient confiance en moi et mon Art pour qu'ils suivent mes conseils et mes prescriptions. Eloigne de leur lit les charlatans, l'armée des parents aux mille conseils, et les gardes[-malades] qui savent toujours tout: car c'est une engeance dangereuse qui, par vanité, fait échouer les meilleures intentions de l'Art et conduit souvent les créatures à la mort. Si les ignorants me blâment et me raillent, fais que l'amour de mon Art, comme une cuirasse, me rende invulnérable, pour que je puisse persévérer dans le vrai, sans égard au prestige, au renom et à l'âge de mes ennemis. Prête-moi, mon Dieu, l'indulgence et la patience auprès des malades entêtés et grossiers.

Fais que je sois modéré en tout, mais insatiable dans mon amour de la science. Eloigne de moi l'idée que je peux tout. Donne-moi la force, la volonté et l'occasion d'élargie de plus en plus mes connaissances. Je peux aujourd'hui découvrir dans mon savoir des choses que je ne soupçonnais pas hier, car l'Art est grand mais l'esprit de l'homme pénètre toujours plus avant."


Trad. SOULIER, Du serment d'Hippocrate à l'éthique médicale, thèse de médecine, Marseille, 1985